Page:Goethe - Hermann et Dorothée, 1886, trad. Boré.djvu/41

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évidés et les cheminées excavées. Je sentis alors un poids sur mon cœur ; mais le soleil, en s’élançant plus radieux que jamais, me rendit le courage. M’étant levée à la hâte, une sorte d’aiguillon me pressa d’aller visiter la place ou avait été notre demeure, pour voir si je retrouverais en vie des poulets que j’aimais d’une affection spéciale, car j’avais encore l’âme d’un enfant. Lorsque je fus montée sur les débris fumants de la maison et des granges, comme je contemplais l’ancienne habitation, maintenant ruinée et dévastée, tu m’apparus montant de l’autre côté de la cour, et cherchant aussi ce qui te restait du logis paternel. Un cheval avait été écrasé sous la chute du toit de ton écurie ; les poutres enflammées, les décombres le couvraient ; on ne voyait plus rien du pauvre animal. Et, comme la muraille qui séparait nos deux cours était abattue, nous étions mit en présence, debout, l’un vis à vis de l’autre, tristes et pensifs. Tu me pris alors par la main, et tu me dis : Lisette, comment te voilà-t-il ici ? Éloigne-toi ! les semelles de tes souliers seraient bientôt consumées ; car, sur ces amas où le feu circule encore, je sens brûler mes grosses bottes. Et tu m’enlevas dans tes bras et me transportas à travers ta cour, dont la porte cochère, avec sa voûte, seule restée intacte, était telle qu’on la voit aujourd’hui. Et là tu me déposais à terre, et, quoique je me défendisse, tu me donnas un