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Page:Gogol - Le Revizor 1922.djvu/46

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38 LE RÉVIZOR

la jeter par la fenêtre... le thé a un goût étrange, le poisson pue... et je meurs littéralement de faim... Pourquoi devrais-je donc?... Jamais, vous entendez !...

Le préfet (timidement). — Excusez... je vous jure que je n'y suis pour rien... Nous avons au marché de la viande excellente... les marchands de Chol- mogor l'apportent, de braves gens, de conduite honnête... Je ne sais vraiment pas où le patron de ce traktir peut l'acheter... Si vous ne vous plaisez pas ici... permettez-moi de vous proposer un autre loge- ment...

Khlestakof. — Je refuse... Je sais ce que signifie un autre logement... la prison, n'est-ce pas? Mais de quel droit? Comment osez-vous... Savez-vous que... je suis fonctionnaire à Petrograd !... (Fièrement.) Je... moi...

Le préfet (à part). — Seigneur, aie pitié... Quelle colère !... Il sait tout... ces maudits marchands lui ont raconté...

Khlestakof (hardiment). — Viendriez-vous avec tout un régiment que je ne vous suivrais pas !... Je me plaindrais au ministre ! (Il frappe la table avec son poing.) Vous n'êtes rien ici, rien !

Le préfet (tremblant de la tête aux pieds). — Je vous en supplie... ne me perdez pas... J'ai une femme, de petits enfants... ne faites pas le malheur d'un homme !

Khlestakof. — Je refuse, vous entendez... Il ne manquerait plus que ça !... C'est parce que vous avez une femme et des enfants que je dois aller en prison...

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