Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

losophie s’en allait dans les classes en se frottant les côtes, et s’asseyait sur les bancs pour reprendre haleine. À son entrée, le professeur, qui, dans sa jeunesse, avait pris part lui-même à de pareils combats, devinait aussitôt, sur les figures échauffées de ses auditeurs, que la bataille avait été chaude ; et pendant qu’il administrait des coups de verge sur les doigts de la rhétorique, un autre professeur dans une autre classe, frappait à tour de bras, avec une pelle de bois, sur les doigts de la philosophie. Quant aux théologiens, on agissait à leur égard d’une façon toute différente ; on leur donnait à chacun, d’après l’expression du professeur de théologie, une mesure de gros pois, c’est-à-dire une bonne dose de coups appliqués avec une lanière de cuir.

Aux jours de fête, les séminaristes et les boursiers s’en allaient dans les maisons de la ville, portant des théâtres de poupées. Quelquefois ils jouaient eux-mêmes une comédie, et dans ce cas, c’était toujours un théologien qui en faisait le héros. Il avait presque la taille du clocher de Kiew, et représentait à merveille Hérodiade ou la femme de Putiphar. En récompense, ils recevaient un morceau de toile, ou un sac de maïs, ou la moitié d’une oie rôtie, ou quelque chose d’approchant. Tout ce peuple savant, le séminaire et la bourse, que divisait une espèce de haine héréditaire, man-