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Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/159

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ne répondait à toutes les questions des curieux que les paroles suivantes :

— Oui, il y a eu toutes sortes de choses. —

Le philosophe était du nombre des gens qui deviennent d’une philanthropie prodigieuse après avoir bien mangé. Il s’était couché par terre, sa pipe à la bouche, considérait tout le monde avec des yeux extrêmement doux, et ne cessait de cracher par les coins de la bouche.

Après dîner, le philosophe se retrouva complétement gai. Il parcourut tout le village, fit connaissance avec tout le monde, et parvint à se faire chasser de deux maisons. Une jeune et jolie paysanne lui donna même un grand coup de pelle sur le dos, au moment où, poussé d’un désir curieux, il allait se convaincre par le toucher de quelle étoffe était fait son justaucorps. Mais plus le soir s’approchait, plus le philosophe redevenait pensif. Une heure avant le souper, tous les gens de la maison se mirent à jouer au kragli : c’est une espèce de jeu de quilles, où l’on emploie, au lieu de boules, de longs bâtons, et celui qui gagne a le droit de monter à cheval sur le perdant. Ce jeu offrait assez souvent un spectacle curieux. Quelquefois le gardeur de chevaux, large comme un flan, grimpait sur le dos du gardeur de cochons, qui était petit, chétif, malingre et tout ratatiné ; d’autres fois, c’était le gardeur de chevaux qui