Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/161

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cercle tracé avec le doigt, prononça quelques exorcismes, et se mit à lire à haute voix, en prenant la ferme résolution de ne pas lever ses yeux du livre, et de ne prêter aucune attention à quoi que ce soit. Il avait déjà lu plus d’une heure, et, fatigué de cette tâche, commençait à tousser ; il tira sa tabatière de sa poche, et avant de porter le tabac à son nez, il jeta un coup d’œil timide sur le cercueil. Son cœur se resserra d’épouvante.... La morte se tenait déjà devant lui debout, sur la trace du cercle, et fixait sur ses yeux des yeux vitreux et ternes. Le pauvre étudiant tressaillit, et sentit un froid glacial courir le long de ses veines. Baissant précipitamment les yeux, il se mit à lire ses prières et ses exorcismes. Il entendit le cadavre grincer des dents, et allonger ses bras de squelette pour le saisir. Mais, en regardant à la dérobée, il s’aperçut que la morte ne le cherchait point là où il était et, à ce qui semblait, ne pouvait pas le voir. Elle se mit tout à coup à gronder sourdement, et à prononcer de ses lèvres glacées des paroles étranges. Ces paroles grésillaient dans sa bouche avec un bruit enroué, comme le pétillement de la poix bouillante. Il n’eût pas su dire ce qu’elles signifiaient, mais il sentait bien qu’elles renfermaient quelque sens terrible. Frappé d’épouvante, il crut comprendre qu’elle faisait des conjurations. En effet, un grand vent s’éleva sou-