Aller au contenu

Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/166

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Oui ; seulement tu ne sais pas comment mes garçons savent chauffer le bain, dit le centenier en se levant debout brusquement. Et son visage prit une expression hautaine et farouche qui trahit son caractère indompté, mais assoupli un moment par la douleur. Chez moi, l’on commence par chauffer, puis on jette de l’eau-de-vie dessus, puis on chauffe encore. Va, va, fais ton affaire. Si tu ne la fais pas, tu ne te lèveras plus. Si tu la fais, tu auras mille ducats.

— Oh ! oh ! c’est un gaillard avec lequel il ne faut pas plaisanter, pensa le philosophe en sortant. Mais tu te trompes, ami, je vais faire en sorte que tu ne me trouves pas, même avec tes chiens. —

Et Thomas se décida à prendre la fuite.

Il attendait le moment qui suit le dîner, alors que tous les gens de la maison avaient l’habitude de se fourrer dans les granges à foin et de dormir la bouche ouverte, en laissant échapper de tels ronflements et de tels sifflements qu’à cette heure la maison seigneuriale paraissait une manufacture. Cette heure arriva enfin. Iavtoukh lui-même ferma les yeux en s’étendant au soleil. Le philosophe s’en alla tout tremblant, et à pas de loup, dans le jardin, d’où il lui semblait plus facile de prendre la clef des champs. Ce jardin était, comme d’ordinaire, abandonné aux mauvaises herbes, et par