Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/97

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rités de sa mort lui donnèrent quelque ressemblance avec celle de Pulchérie Ivanovna. Un jour, Athanase Ivanovitch se promenait dans son jardin ; il marchait lentement, le long d’un sentier, avec son insouciance accoutumée et sans avoir aucune idée dans la tête, lorsqu’il entendit tout à coup quelqu’un prononcer derrière lui, d’une voix fort distincte :

— Athanase Ivanovitch ! —

Il se retourna vivement, personne n’était là. Il regarda de tous côtés, et ne vit rien. Le temps était serein, le soleil brillait. Il réfléchit un instant ; son visage s’anima, et il finit par dire :

— C’est Pulchérie Ivanovna qui m’appelle. —

Il vous est sans doute arrivé, mon cher lecteur, d’entendre une voix vous appeler par votre nom. Nos paysans expliquent cela en disant que c’est une âme qui languit du désir de revoir la personne qu’elle nomme, et que la mort suit infailliblement un pareil appel. Je me souviens que, dans ma jeunesse, cela m’est arrivé souvent ; j’entendais quelqu’un prononcer distinctement mon nom derrière moi ; c’était d’ordinaire par un jour de soleil, paisible et beau. Pas une seule feuille ne remuait aux arbres ; les grillons même cessaient de crier ; il n’y avait âme qui vive au jardin, où régnait un silence de mort. Mais je conviens que la nuit la plus noire et la plus orageuse, me surpre-