Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/110

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ressemblait à la création d’un artiste qui vient de lui donner la dernière main ; naguère c’était une jeune fille espiègle, maintenant c’était une femme accomplie, et dans toute la splendeur de sa beauté. Ses yeux levés n’exprimaient plus une simple ébauche du sentiment, mais le sentiment complet. N’ayant pas eu le temps de sécher, ses larmes répandaient sur son regard un vernis brillant. Son cou, ses épaules et sa gorge avaient atteint les vraies limites de la beauté développée. Une partie de ses épaisses tresses de cheveux étaient retenues sur la tête par un peigne ; les autres tombaient en longues ondulations sur ses épaules et ses bras. Non seulement sa grande pâleur n’altérait pas sa beauté, mais elle lui donnait au contraire un charme irrésistible. Andry ressentait comme une terreur religieuse ; il continuait à se tenir immobile. Elle aussi restait frappée à l’aspect du jeune Cosaque qui se montrait avec les avantages de sa mâle jeunesse. La fermeté brillait dans ses yeux couverts d’un sourcil de velours ; la santé et la fraîcheur sur ses joues hâlées. Sa moustache noire luisait comme la soie.

— Je n’ai pas la force de te rendre grâce, généreux chevalier, dit-elle d’une voix tremblante. Dieu seul peut te récompenser…

Elle baissa les yeux, que couvrirent des blanches paupières, garnies de longs cils sombres. Toute sa tête