Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/127

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— Écoute, seigneur ; je raconterai tout au seigneur, dit le juif Dès que j’entendis le bruit du matin, dès que je vis qu’on entrait dans la ville, j’emportai avec moi, à tout événement, une rangée de perles, car il y a des demoiselles dans la ville ; et s’il y a des demoiselles, me dis-je à moi-même, elles achèteront mes perles, n’eussent-elles rien à manger. Et dès que les gens de l’officier polonais m’eurent lâché, je courus à la maison du vaïvode, pour y vendre mes perles. J’appris tout d’une servante tatare ; elle m’a dit que la noce se ferait dès qu’on aurait chassé les Zaporogues. Le seigneur Andry a promis de chasser les Zaporogues.

— Et tu ne l’as pas tué sur place, ce fils du diable ? s’écria Boulba.

— Pourquoi le tuer ? Il a passé volontairement. Où est la faute de l’homme ? Il est allé là où il se trouvait mieux.

— Et tu l’as vu en face ?

— En face, certainement. Quel superbe guerrier ? il est plus beau que tous les autres. Que Dieu lui donne bonne santé ! Il m’a reconnu à l’instant même, et quand je m’approchai de lui, il m’a dit…

— Qu’est-ce qu’il t’a dit ?

— Il m’a dit !… c’est-à-dire il a commencé par me faire un signe du doigt, et puis il m’a dit : « Yankel ! »