Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/133

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les cosaques, sûrs d’avance que Popovitch allait lâcher un bon mot.

— Parce que toute l’armée peut se cacher derrière lui, et qu’il serait fort difficile d’attraper quelqu’un avec la lance par delà son ventre.

Tous les Cosaques se mirent à rire et, longtemps après, beaucoup d’entre eux secouaient encore la tête en répétant :

— Ce diable de Popovitch ! s’il s’avise de décocher un mot à quelqu’un, alors…

Et les Cosaques n’achevèrent pas de dire ce qu’ils entendaient par alors…

— Reculez, reculez ! s’écria le kochevoï.

Car les Polonais semblaient ne pas vouloir supporter une pareille bravade, et le colonel avait fait un signe de la main. En effet, à peine les Cosaques s’étaient-ils retirés, qu’une décharge de mousqueterie retentit sur le haut du parapet. Un grand mouvement se fit dans la ville ; le vieux vaïvode apparut lui-même, monté sur son cheval. Les portes s’ouvrirent, et l’armée polonaise en sortit. À l’avant-garde marchaient les hussards[1], bien alignés, puis les cuirassiers avec des lances, tous portant des casques en cuivre. Derrière eux chevauchaient

  1. Mot pris aux Hongrois pour désigner la cavalerie légère. En langue madgyare il signifie vingtième, parce que, dans les guerres contre les Turcs, chaque village devait fournir, sur vingt hommes, un homme équipé.