Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/137

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sa bourse pleine de ducats, lui détacha du cou un petit sachet qui contenait, avec du linge fin, une boucle de cheveux donnée par une jeune fille, en souvenir d’amour. Borodaty n’entendit pas que l’officier au nez rouge arrivait sur lui par derrière, celui-là même qu’il avait déjà renversé de la selle, après l’avoir marqué d’une balafre au visage. L’officier leva son sabre et lui asséna un coup terrible sur son cou penché. L’amour du butin n’avait pas mené à une bonne fin l’ataman Borodaty. Sa tête puissante roula par terre d’un côté, et son corps de l’autre, arrosant l’herbe de son sang. À peine l’officier vainqueur avait-il saisi par sa touffe de cheveux la tête de l’ataman pour la pendre à sa selle, qu’un vengeur s’était déjà levé.

Ainsi qu’un épervier qui, après avoir tracé des cercles avec ses puissantes ailes, s’arrête tout à coup immobile dans l’air, et fond comme la flèche sur une caille qui chante dans les blés près de la route, ainsi le fils de Tarass, Ostap, s’élança sur l’officier polonais et lui jeta son nœud coulant autour du cou. Le visage rouge de l’officier rougit encore quand le nœud coulant lui serra la gorge. Il saisit convulsivement son pistolet, mais sa main ne put le diriger, et la balle alla se perdre dans la plaine. Ostap détacha de la selle du Polonais un lacet en soie dont il se servait pour lier les prisonniers, lui garrotta les pieds et les bras, attacha l’