Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/207

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

sous ma garde. Attends, je vais appeler les nôtres.

Taras vit son imprudence, mais l’entêtement et le dépit l’empêchèrent de songer à la réparer. Par bonheur, à l’instant même, Yankel parvint à se glisser entre eux.

— Mon seigneur ! Comment serait-il possible que le comte fût un Cosaque ! Mais s’il était un Cosaque, où aurait-il pris un pareil vêtement et un air si noble ?

— Va toujours !

Et le heiduque ouvrait déjà sa large bouche pour crier.

— Royale Majesté, taisez-vous, taisez-vous ! au nom de Dieu, s’écria Yankel, taisez-vous ! Nous vous payerons comme personne n’a été payé de sa vie ; nous vous donnerons deux ducats en or.

— Hé, hé ! deux ducats ! Deux ducats ne me font rien. Je donne deux ducats à mon barbier pour qu’il me rase seulement la moitié de ma barbe. Cent ducats, juif !

Ici le heiduque retroussa sa moustache supérieure.

— Si tu ne me donnes pas à l’instant cent ducats, je crie à la garde.

— Pourquoi donc tant d’argent ? dit piteusement le juif, devenu tout pâle, en détachant les cordons de sa bourse de cuir.