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l’assemblée du mir[1], bien que son pouvoir soit limité par la majorité, le bailli prend toujours le dessus, et presque à sa guise.

Grave et renfrogné, le bailli est avare de ses paroles.

Il y a longtemps, bien longtemps, lorsque la grande Czarine Catherine — de bienheureuse mémoire — faisait son voyage de Crimée, il fut choisi pour l’escorter. Deux jours entiers, il remplit cette fonction, et il eut même l’insigne honneur de s’asseoir sur le siège du cocher impérial. Depuis ce temps le bailli a appris à baisser la tête d’un air important et absorbé, caressant ses longues moustaches et jetant, en dessous, un regard de faucon. Depuis ce temps, quel que fût le sujet de la conversation, il trouvait moyen de rappeler comment il avait conduit la Czarine et comment il s’était assis sur le siège de la voiture impériale.

Le bailli aime parfois à faire le sourd, surtout quand il entend ce qu’il ne voudrait pas entendre. Le bailli ne peut pas souffrir une mise recherchée ; il porte invariablement une svitka en drap noir tissé à la maison, sur la-

  1. Assemblée des chefs de famille de la commune.