Page:Goldsmith - Le Vicaire.djvu/124

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c’est un ange, — Ah ! monsieur Thornhill, vous flattez ma pauvre fille. Nous avons songé à la marier à un de vos tenanciers, dont la mère vient de mourir et qui a besoin d’une ménagère ; vous savez qui je veux dire, le fermier Williams ; un brave homme, monsieur Thornhill, capable de lui faire manger de bon pain et qui nous l’a plusieurs fois demandée. » Il l’avait demandée effectivement. « Mais je serais bien aise, monsieur, d’avoir, pour ce choix, votre approbation. — Comment ! madame, mon approbation !… mon approbation pour un pareil choix !… Jamais !… Sacrifier tant de beauté, de sens, de bonté, à un rustre incapable de sentir son bonheur ! Pardon, madame… jamais je ne pourrai approuver pareille injustice ; et j’ai mes raisons… — Oh ! monsieur, si vous avez vos raisons, c’est une autre affaire ; mais je serais ravie de les connaître, vos raisons. — Encore une fois, pardon, madame ! Elles sont là (il mit la main sur son cœur) trop avant pour être révélées ! elles sont ensevelies, elles sont rivées là ! »

Dès qu’il fut parti, consultation générale ; mais que penser de tous ces beaux sentiments !… Impossible à nous de le dire. Olivia les regardait comme les indices de la plus ardente passion. Je n’étais pas, moi, tout à fait si confiant ; il me semblait assez clair qu’il y avait là plus d’amour que de mariage. Au reste, quoi que ces sentiments pussent présager, on résolut de suivre le projet dont l’élément principal était le fermier Williams qui, dès la première apparition de ma fille dans le pays, lui avait fait sa cour.