ayons juré de ne pas révéler son nom. — Oh ! alors, mon enfant, viens encore dans mes bras !… et, plus que tout à l’heure, mille fois, tu es la bienvenue. Car, maintenant tu es sa femme d’intention et de fait, et toutes les lois humaines, fussent-elles gravées sur des tables de diamant, ne peuvent atténuer la force de ce lien sacré !…
— Ah ! pauvre père ! vous êtes bien peu au fait de ses infamies !… il a déjà été marié, par le même prêtre, à six ou huit femmes que, comme moi, il a séduites et abandonnées !
— Marié !… lui !… Alors il faut faire pendre le prêtre, et demain matin tu déposeras ta plainte. — En ai-je le droit, monsieur, quand j’ai promis le secret ? — Si tu as fait pareille promesse, chère enfant, je ne puis ni ne veux t’engager à la violer. Quoiqu’il y aille de l’intérêt public, tu ne peux porter plainte contre lui. Un peu de mal pour beaucoup de bien, c’est l’esprit de toutes les institutions humaines ! Ainsi, on peut, en politique, sacrifier une province pour conserver un royaume ; en médecine, couper un membre pour sauver le corps. Mais la religion !… sa loi est écrite et elle est inflexible !… Ne jamais faire le mal. Cette loi est juste, mon enfant ; car, un peu de mal pour beaucoup de bien, c’est une faute certaine pour un avantage éventuel ; or, l’avantage fût-il bien assuré, toutefois le moment entre la faute et l’avantage, moment bien reconnu coupable, peut être celui où nous sommes appelés à répondre de ce que nous avons fait, où le compte des actions humaines est clos à jamais… Mais je t’interromps, ma chère ; continue.
— Le lendemain même, je reconnus combien j’avais peu de fonds à faire sur sa sincérité. Dans la matinée, il me présenta à deux malheureuses femmes que, comme moi, il avait séduites ; mais qui, livrées à la prostitution, s’arrangeaient de cette vie. Je l’aimais trop tendrement pour partager son cœur avec de pareilles rivales ; je cherchai l’oubli de ma honte dans le tumulte des plaisirs ; je le demandai au