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CHAPITRE X.

Efforts de la famille pour aller de pair avec plus riche qu’elle.
Misère du pauvre qui veut briller.

Je commençai seulement alors à m’en apercevoir : mes longues et laborieuses exhortations à la modestie, à la simplicité, à la résignation, étaient complètement méprisées. Les avances que venaient de nous faire plus riches que nous réveillèrent cet orgueil que j’avais endormi, mais que je n’avais pu détruire. Nos fenêtres, comme par le passé, se couvrirent d’eaux pour le cou et le visage. On redouta — le soleil : c’était, au dehors, l’ennemi de la peau — le feu : c’était, au dedans, le fléau du teint. Ma femme prétendit que se lever trop tôt cernait les yeux de ses filles, que travailler après le dîner leur rendait le nez rouge. « Jamais, me dit-elle, les mains n’ont l’air aussi blanches que quand elles ne font rien. » Et, partant, au lieu d’achever les chemises de George elles se mirent à rajeunir leurs vieilles gazes, à broder sur le marly. Les pauvres miss Flamborough, leurs gentilles compagnes de la veille, furent mises de côté, comme des connaissances de trop bas lieu, et la conversation ne roula plus que sur le grand monde, la société du grand monde, les tableaux, le goût, Shakspeare et l’harmonica.