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Page:Gomont - Anecdotes historiques et morales, 1851.pdf/6

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écouter un sophiste très en vogue. On appelait sophistes des hommes qui faisaient métier de traiter des questions de philosophie, et de prouver les choses les plus contraires. Ces hommes, en réalité, n’avaient aucune conviction ; mais, parler d’une manière subtile sur tout, et tout prouver, les faisait vivre et cela leur suffisait. Caton l’entendit d’abord discourir sur la vertu, et rien ne lui parut plus beau que la vertu. Il l’entendit ensuite parler sur le crime ; et, c’est lui-même qui nous l’apprend, rien ne lui parut plus grand, plus beau que le crime. Cependant, bien qu’incapable de réfuter les raisonnements du sophiste, bien qu’ébloui même par ses belles phrases, il n’en conserva pas moins toute sa sympathie pour la vertu, toute sa haine pour le crime ; car il ne savait quelle voix secrète, quel instinct lui disait que tout ce beau discours n’était que mensonge.

Dans cette vie, nous nous trouvons parfois dans la même position que le vieux Caton. Les doctrines fausses ou coupables sont souvent présentées avec tant de talent et d’adresse, que nous sommes bien embarrassés pour démontrer aux autres, ou à nous-mêmes en quoi elles pèchent.