CHAPITRE IV
I
Deux contemporains se présentent à nous. Leur pensée scrute les mêmes problèmes ; leur étude repose sur les mêmes principes ; les résultats auxquels ils arrivent offrent des traits de la plus surprenante analogie. Et cependant quel contraste ! L’un est poète, l’autre géomètre ; l’un est doué d’une imagination ardente, l’autre fait preuve d’un jugement froid et sobre ; l’un brille par sa jactance et son orgueil démesuré, l’autre disparaît absolument derrière son œuvre ; l’un s’abandonne à une débauche d’images éclatantes, l’autre écrit en une prose simple et sans ornements ; l’un est d’une souplesse telle que l’expression « ondoyant et divers » semble avoir été créée pour lui ; l’autre est, dans ses raisonnements, d’une raideur poussée jusqu’à l’absurdité. Chacun des deux se distingue surtout par les qualités qui font défaut à l’autre : Empédocle par une foule d’aperçus brillants, ingénieux et souvent allant droit au but ; son aîné, Anaxagore, par la solide charpente d’un système où tout se tient et s’enchaîne puissamment.