Page:Goncourt, L'Italie d'hier, 1894.djvu/125

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les lèvres le voltigement d’un hymne ; ou bien ces vierges se penchent, la tête abaissée, pieusement recueillies sur les musiques qui s’envolent ; ou bien encore, la tête au ciel, elles jettent en l’air la prière de leurs voix et de leurs luths mêlés ensemble — le sourire sensuel de Clodion dans les bouches, les regards pieux du Pérugin dans les yeux.

Mais laissons les faïences, et venons aux œuvres de Luca, dans la pierre et le marbre, où se montre un sentiment d’art plus élevé, peut-être moins industriel. Voyez ces trois sonneurs de longues buccines, aux joues gonflées, comme des joues de Tritons rejetant l’eau de mer de leurs bouches. D’un élégant geste, deux garçonnets, appuyés aux sonneurs, les cheveux ramassés et noués sur le sommet de la tête, posant sur un pied, font de leurs bras juxtaposés un arceau, sous lequel se glisse, en se baissant, une ronde enfantine. Un enfant, à la chemisette attachée aux épaules et fendue sur les cuisses, rejeté en dehors par la rupture de la ronde, a la tête et le bras tendus en avant, pour retrouver la main d’un petit danseur, dont une jambe bat joyeusement l’air de son orteil retroussé, et qui laisse pendre derrière lui un bras cherchant la main tendue de l’autre, pour rentrer dans la ronde toujours recommençante.

Et encore des sculptures, où on les voit, ces enfants, les yeux plissés par un sourire malicieux, le dos