Page:Goncourt, L'Italie d'hier, 1894.djvu/142

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chapelles entières, de toute la surface des murs d’une basilique.

En ce pays de ferronnerie artistique garnissant les angles des palais, de torchères faites par des chimères ou des êtres fantastiques, sous lesquelles d’ordinaire est un anneau admirablement travaillé, l’anneau où s’attachaient les mules des visiteurs, le souvenir s’est conservé d’un célèbre ouvrier en fer, de Niccolò Grosso Caparra, qui fit les magnifiques ferrures du palais Strozzi. Un original artiste, qui n’entendait faire crédit à personne, quelque puissante que cette personne fût, et voulait de suite la caparra (le dépôt de l’argent) d’où le nom lui avait été donné par Laurent de Médicis, allant lui faire une commande lui-même, et ne pouvant obtenir qu’il abandonnât un travail, qu’il avait commencé pour de petites gens, mais qui l’avaient payé d’avance. Il avait fait appliquer sur sa boutique une enseigne, où l'on voyait des livres qui brûlaient, et quand quelqu’un lui demandait du temps pour le payer, il lui répondait, en montrant son enseigne : « Ça m’est impossible, vous voyez, mes livres sont brûlés, non posso più iscrivere debitori (je ne peux plus inscrire de débiteurs). En qualité de catholique fervent, il ne voulut jamais travailler pour les juifs, disant que leur argent était fratricide et putivano, et en dépit de son amour de l’ar-