Page:Goncourt, L'Italie d'hier, 1894.djvu/181

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Comme je développais, assez éloquemment, des idées, sur les points de rapprochement entre nations, des races latines, et des sympathies, que ces points de rapprochement devaient amener entre les Italiens et les Français, mon interlocuteur toscan, un avocat très distingué, eut une espèce de rire muet, légèrement ironique, et après un silence, me jeta ces paroles : « Monsieur, je crains bien, qu’à ce sujet, vous ayez des illusions… de complètes illusions… Du reste, l’expérience vous est facile à faire… et vous pouvez vous convaincre, dans le premier salon venu d’ici, où il y aura un Français et un Anglais, que l’Italien ira, instinctivement, à l’Anglais. »

Et ce rire muet, et ces paroles de l’avocat toscan, me remettaient tout à coup en mémoire, ce que raconte le bailli Grosley de la gallophobie, dans je ne sais plus quelle ville d’Italie, au dix-huitième siècle, d’un aubergiste maître de poste, chez lequel il logeait : un vieillard impotent, confiné au coin de son feu, et passant la journée à souhaiter au voyageur français et à ses domestiques, la rabbia, le canchero, dans une verbosité haineuse, tout à fait amusante.

Au fond, un charmant et désirable endroit de la terre à habiter que cette ville de Florence, où une journée d’hiver n’est pas plus froide qu’une nuit d’été, à Paris,