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LXIII.


Tout le mois d’octobre, Germinie s’obstina à ne pas vouloir s’aliter. Chaque jour, cependant, elle était plus faible, plus défaillante, plus abandonnée de son corps. À peine si elle pouvait monter l’étage qui allait à son sixième, en se tirant le long de la rampe. À la fin, elle tombait dans l’escalier : les autres domestiques la ramassaient et la portaient jusqu’à sa chambre. Mais cela ne l’arrêtait pas : le lendemain, elle redescendait avec cette lueur de force que le matin donne aux malades. Elle préparait le déjeuner de mademoiselle, elle faisait un semblant d’ouvrage, elle tournait encore dans l’appartement, s’accrochant aux meubles, se traînant. Mademoiselle en avait pitié : elle la forçait à se jeter sur son propre lit. Germinie y reposait une demi-heure, une heure, sans dormir, ne parlant pas, les yeux ouverts, immobiles et vagues, comme les gens qui souffrent.

Un matin, elle ne descendit pas. Mademoiselle monta au sixième, tourna dans un étroit corridor empesté par des lieux de domestiques, et arriva à la porte de Germinie, la porte 21. Germinie lui demanda bien pardon de l’avoir fait monter. Il lui avait été impossible de mettre les pieds au bas de