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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/155

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ainsi de l’autre. Ainsi de M. de Sartines, l’ami de M. de Montbarrey, qui avait donné à la Reine le droit de ne plus l’appeler que l’Avocat Pathelin ou le doucereux menteur[1]. Ainsi de tous, ceux-ci ligués contre la Reine avec les défiances et les perfidies de Maurepas, ceux-là avec les utopies économiques des Turgot et des Necker. La Reine ne répondait à tous qu’en riant et en laissant rire autour d’elle, permettant à la princesse de Talmont de prendre le ministre Laverdy pour l’apothicaire de la cour, et de le tourmenter longuement sur les opérations des finances, dont elle faisait mille drogues mauvaises, altérées, falsifiées[2]. Petites et bien petites vengeances d’hostilités soutenues, persistantes, répandant à la cour et au dehors le mensonge et la désaffection ! Contre les hommes qui se servaient d’autres armes, la Reine ne voulait user que de la gaieté de son esprit. Pousser à un changement, prendre une initiative, toucher au ministère, elle n’y pensait pas, elle ne voulait pas y penser. Elle détestait trop les affaires et leur ennui. Elle était trop attachée à sa paresse de femme[3], pour remplir ce rôle que lui prêtait déjà l’opinion publique, pour diriger le Roi et remuer tant d’intrigues. Qu’avait été jusqu’alors l’influence de cette Reine, disgraciant ses amis lorsqu’ils voulaient la pousser aux choses de la politique ? À peine une part

  1. Correspondance secrète (par Métra), vol. X.
  2. Mémoires de la République des lettres, vol. XVIII.
  3. Correspondance du comte de Mirabeau et du comte de La Marck. Introduction.