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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/156

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aux grâces. Elle avait fait reconnaître quelques droits, obtenir quelques priviléges de théâtre, accorder quelques pensions de gens de lettres. Elle avait cherché, en un mot, bien plus à faire des heureux qu’à faire des ministres. Quand s’était-elle approchée des affaires ministérielles ? Seulement alors qu’il s’était agi d’acquitter une dette de reconnaissance envers M. de Choiseul. Elle était intervenue dans le procès de M. de Bellegarde, dont elle demanda la révision, ne permettant pas qu’un brave officier, pour avoir obéi au duc de Choiseul, fût sacrifié au parti d’Aiguillon[1]. Elle était intervenue dans l’affaire du duc de Guines, poursuivi par MM. Turgot et de Vergennes comme ami du duc de Choiseul, et impliqué dans la cause d’un secrétaire qui avait joué sur les fonds publics de Londres. La Reine n’était entrée dans les affaires d’État que pour arracher deux victimes aux ressentiments d’un parti cherchant à déshonorer un autre parti[2].

Quand la société Polignac se fut constituée autour de la Reine, ce ne fut pas uniquement la soif de l’intrigue et l’avidité de la domination qui firent

  1. Correspondance secrète (par Métra), vol. IV.
  2. Mercy-Argenteau dit que dans cette affaire du duc de Guines, il y eut une sorte de violence exercée par la Reine sur la volonté du Roi. Il explique l’animation de la Reine contre Turgot et Vergennes par une conspiration des entours de Marie-Antoinette, obsédant la Reine pendant les courses, les parties de plaisir, les conversations de la soirée chez la princesse de Guéménée, travaillant à piquer l’amour-propre de Marie-Antoinette, à l’irriter, à noircir à ses yeux ses adversaires politiques.