Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/329

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aux théâtres, de faire chanter encore : « Chantons, célébrons notre Reine ! » La Reine paraissait à la Comédie-Française, à l’Opéra, aux Italiens ; elle retrouvait les bravos et les acclamations de ses heureux jours. Mais la guerre civile entrait au théâtre avec la Reine. Les Jacobins défendaient à Clairval de chanter :

« Reine infortunée, ah ! que ton cœur Ne soit plus navré de douleur ! Il te reste encore des amis[1]. »

Madame Dugazon, qui s’était inclinée vers la loge de la Reine en chantant : « Ah ! comme j’aime ma maîtresse ! » était huée ; les cris : « Pas de Reine ! pas de maîtresse ! » couvraient les cris de : Vive la Reine ! et le lendemain, le journal qui, à propos de la fête des soldats de Châteauvieux, imprimera qu’il faut couler du plomb fondu dans les mamelles de Marie-Antoinette[2], l’Orateur du peuple imprimait : « La Reine aura le fouet dans sa loge au spectacle ; la Reine fait la gourgandine… » Ce qui suit ne peut être cité[3].

La nouvelle Constitution imposée au Roi ne désolait point seulement la Reine, elle la tourmentait encore dans son intérieur et tracassait misérablement ses amitiés et ses habitudes. Cette formation d’une maison constitutionnelle de la Reine, décrétée par la nouvelle constitution, qu’était-ce, sinon

  1. Révolution de Paris, n° 110.
  2. L’Orateur du peuple, n° 43.
  3. Ibid., n° 53.