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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/357

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« Je n’ai de consolation qu’à vous écrire, mon cher frère, je suis entourée de tant d’atrocités que j’ai besoin de toute votre amitié pour reposer mon esprit ; j’ai pu par un bonheur inouï voir la personne de confiance du comte de M…[1], mais je n’y suis parvenû qu’une fois sûrement ; elle m’a exposé des pensées du comte qui se rencontre avec beaucoup de ce que je vous ai déjà dit ces jours derniers ; depuis l’acceptation de la Constitution le peuple semble nous avoir rendu sa confiance, mais cet événement n’a pas étouffer les mauvais desseins dans le cœur des méchants ; il seroit impossible qu’on ne revienne pas à nous si l’on connoissait notre véritable manière de penser, mais malgré cette sécurité du moment, je suis loins de me livrer à une confiance aveugle ; je pense qu’au fond le bon bourgeois et le bon peuple ont toujours été bien pour nous, mais il n’y a entre eux nul accord, et il n’en faut pas attendre ; le peuple, la multitude sent par instinct et par intérêt le besoin de s’attacher à un chef unique, mais ils n’ont pas la force de se débarrasser de tous les tirans de populace qui les opprime, n’ayant point d’unité, et ayant à lutter contre des scélérats bien d’accord qui se donnent d’heure en heure le mot d’ordre dans les clubs ; et puis on les travaille sans cesse, on leur glisse avec perfidie des soupçons contre la bonne foi du Roi, et l’on viendra ainsi à bout de soulever de nouveaux orages ; si cela arrive comme je le crains,

    monarchie. Les points d’amendement renferment tout ce qu’il est nécessaire de vouloir, possible d’exécuter avec stabilité. »

  1. M. de Mercy.