Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/49

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la Dauphine, et madame du Barry n’avait plus de craintes le jour où il échappait au Roi, dans une parole amère comme un remords : « Je sais bien que Madame la Dauphine ne m’aime pas ! »

Les filles de Louis XV, les tantes du Dauphin, que leur âge, leur position à la cour, leur affection pour le Dauphin appelaient à être les tutrices de l’inexpérience et de la jeunesse de la Dauphine, qui étaient-elles, et qu’allaient-elles être pour Marie-Antoinette ? Mesdames étaient de vieilles filles, au fond desquelles était resté quelque chose de leur éducation de couvent et de l’inepte direction de cette madame d’Andlau, sur laquelle la lettre du Dauphin renseigne si tristement. Elles n’avaient rien en elles de l’indulgence des grand’mères, mais toutes les sévérités de l’âge et toutes les aigreurs du célibat. Mesdames vivaient dans les froideurs de l’étiquette, dans le culte de leur rang, dans l’ennui et la roideur d’une petite cour calquée sur celle de la feue Dauphine, la princesse de Saxe,

    1770, lettre dans laquelle la Dauphine s’exprime en ces termes sur le compte de la favorite : « … Le Roi a mille bontés pour moi et je l’aime tendrement mais s’est à faire pitié la faiblesse qu’il a pour Mme du Barry qui est la plus sotte et impertinant créature qui soit imaginable, elle a joué tous les soirs avec nous à Marly elle s’est trouvé deux fois à côtés de moi mais elle ne m’a point parlé et je n’ai point tachée justement de lié conversation avec elle mais quand il le faloit je lui ai pourtant parlé… » La lettre est curieuse comme orthographe et comme témoignage de la bien incomplète connaissance de la langue française que possédait la Dauphine à son arrivée en France. (Maria-Theresia und Marie-Antoinette, von Arneth, 1865.)