Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/293

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avec un rien de pion et un peu du bagout de faiseur. Il nous parle de sa personne, de ses cheveux déjà gris, de sa mère, de sa sœur, de sa famille, de son château de Saverne, de ses cinq domestiques, des dix-huit personnes qu’il a toujours à sa table, de sa chasse, de son ami Sarcey de Suttières, dont le roman des « Salons de province » vient comme du Balzac bien écrit, de la désillusion qu’il a eue à relire Notre-Dame de Paris, la semaine dernière, des qualités de Ponson du Terrail, et du cas qu’il en fait avec Mérimée. C’est le moi du succès, mais point trop lourd, point trop insupportable, et sauvé par des singeries spirituelles, par de petites caresses littéraires à l’endroit des littérateurs qui sont là, et auxquels il sert des citations de leurs livres. Mais dans sa conversation, pas un atome qui ne soit terrestre, parisien, et de petit journal.

Il nous entretient de son livre la Question romaine, qui vient d’être saisi. Il nous dit, et nous le croyons, que l’Empereur a corrigé les épreuves, que Fould y a travaillé et que Morny a fourni la fin, « la Métropole à Paris », une idée du Mémorial, une idée de l’autre, dont tout cet empire est une contrefaçon. About a ajouté que Fould lui avait confié qu’on préparait les appartements du pape à Fontainebleau, à Fontainebleau ! si par hasard il voulait se montrer méchant, ou si Antonelli faisait quelque tour.

— Si j’étais tout à fait riche, j’aurais aimé à faire une collection de toutes les saletés des gens