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Dimanche 1er avril. — Nous parlions aujourd’hui de l’amoureux à la mode, de l’homme à femmes de l’heure présente, et du renouvellement qui se fait tous les trente ans, dans la physionomie du séducteur. Le ténébreux de 1830 est démodé ; qui l’a remplacé ? le jocrisse de salon, le farceur, le faiseur d’imitations. Et ce changement vient de l’influence du théâtre sur les femmes. En 1830, c’étaient les Antony qui faisaient prime, aujourd’hui ce sont les Grassot. L’acteur dominant, culminant d’une époque, semblerait donner le la à la séduction amoureuse.

— Certains mots d’une méchanceté sublime sont donnés à des femmes sans intelligence : la vipère a la tête plate.

7 avril. — À la salle du Vaux-Hall, rue de la Douane, à un assaut donné par Vigneron, qui annonce le Désespoir des bras tendus.

Un rendez-vous de la force moderne, depuis l’athlète de la lutte à main plate et l’hercule du Nord, jusqu’au gymnaste de l’« Adresse française ». Tous les types : les forts de la Halle apoplectiques, à la chemise sans cravate, à la courte blouse relevant et ouverte ; les marchands de vins à nuque de taureau ; les maigres petits savetiers pâlots, à la mine de catin, le cou et les bras nus dans des gilets de flanelle rose ; les souples tireurs de canne, à la tête de chat ; les jolis éreintés de barrière, un bou-