Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/350

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l’immortalité de l’âme, le libre arbitre, c’est très drôle de s’occuper de tout cela jusqu’à vingt-deux ans ; mais après, ça n’est plus de circonstance. On doit s’occuper à avoir une maîtresse qui respecte vos nerfs, à convenablement arranger son chez-soi, à posséder des tableaux passables… et surtout à bien écrire. Voilà l’important : des phrases bien faites, et encore quelques métaphores ; oui, quelques métaphores, ça pare l’existence… — Markowski, Markowski, qu’est-ce que c’est que ça ? répétait Flaubert dans un coin du salon avec l’ignorance d’un vrai provincial. — Mon cher, — c’est Claudin qui parle, — Markowski était un bottier. Il s’est mis à apprendre le violon tout seul, et puis à danser aussi tout seul. Alors il a donné des bals avec des filles. Dieu a béni ses efforts. Il est sorti vivant de quelques raclées que lui a fait distribuer Adèle Courtois, et aujourd’hui il est propriétaire de la maison qu’il habite. »

En descendant l’escalier d’Aubryet, je demande à Gautier s’il ne souffre pas de ne plus habiter Paris.

« Oh ! cela m’est parfaitement égal. Ce n’est plus le Paris que j’ai connu. C’est Philadelphie, Saint-Pétersbourg, tout ce qu’on veut ! »

— Les mots ! les mots ! On a brûlé au nom de la charité, on a guillotiné au nom de la fraternité. Sur le théâtre des choses humaines, l’affiche est presque toujours le contraire de la pièce.

— Une main humaine, presque toujours une main de femme, les doigts autour d’une aumônière