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spectres, les genoux ramassés sous les corps voûtés, et sur les genoux un gueux au-dessus duquel se croisent leurs deux mains, comme les deux mains qui sont sur les tombeaux. À votre entrée, vous êtes cloué au sol par un féroce : « Qu’est-ce que vous prenez ? » et il faut prendre un petit verre d’eau-de-vie, de cette eau-de-vie de la basse prostitution qui vous entre dans la gorge comme un glaive à triple lame. Dans cette maison où il n’y a pas de prostituées au-dessous de 60 ans, et où ces femmes ont de vieux béguins de linge maternels, — on débite de l’amour depuis 50 jusqu’à 10 centimes aux vieux pervertis et aux tout petits jeunes gens timides du peuple.

Dans le quartier, ce lupanar est plutôt connu sous ce terrible nom : les Parques.

— Je ne sais pourquoi le directeur de la Porte-Saint-Martin avait exposé au foyer les portraits que Gavarni a publiés dans le Paris, et parmi lesquels figuraient les nôtres. À ce qu’il paraît, m’apprend un ami, une jeune et jolie fille s’est toquée de mon portrait.

 

Cette fille me racontait, cette nuit, que, lorsqu’elle avait tenté de se noyer, elle avait passé la nuit, toute la nuit, jusqu’à quatre heures du matin, à se promener au bord de la Gironde avec la tentation de rentrer à la maison, mais empêchée par la crainte d’une moquerie. La rivière allait en pente très douce,