Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/31

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un mouvement de mépris, et cette parole : « Dans tout cela, il n’y a pas un homme capable d’un acte de vertu ! »

Comment, d’un acte de vertu ? lui crie-t-on, ce n’est pas un acte de vertu, l’acte de dévouement qui fait donner leur vie à ces privés de gloire, à ces innommés, à ces anonymes de la mort ?

25 août. — Je regarde cette maison bourrée de livres, de gravures, de dessins, d’objets d’art, qui feront des trous dans l’histoire de l’art de l’École française, si tout cela brûle, — et ces choses, mes amours d’autrefois, — je n’ai pas l’énergique désir de les sauver.

26 août. — Au chemin de fer de l’Est. Au milieu de caisses, de paniers, de paquets de vieux linge, de corbillons, de bouteilles, de matelas, d’édredons, liés ensemble avec de grosses cordes, maintenant un peu l’assemblage branlant et dégringolant de toutes ces choses disparates, les yeux vifs de petits paysans, enfouis, calés, dans les trous et les interstices. Et devant, avec un chien de chasse sur ses pieds, et une béquille posée à côté d’elle, une vieille Lorraine, en bonnet brun piqué, qui tire de temps en temps, d’un cabas, le raisin noir de la vigne de là-bas, qu’elle passe à ses petits-enfants.

Samedi 27 août. — Zola vient déjeuner chez moi.