Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/31

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— et ce salon, du moins le vrai, l’authentique, je le connais bien, car je l’ai découvert et fait acheter à mon cousin Alphonse de Courmont, ses boiseries 3 000 francs, — qu’il eût payées 30 000 chez Vidalenc — eh bien, parole d’honneur, les personnages de Bouilhet sont plus faux que ce décor. Toutefois la pièce va cahin-caha, dans la déférence du public pour les hexamètres d’un mort, mais quand l’honnête chevalier d’Aydie entrevoit le rôle du pétrole dans les châteaux royaux, ce sont des applaudissements, des hourrahs, un enthousiasme qui assure le succès, que dis-je, le triomphe de cette singulière restitution historique, mettant dans la bouche des gentilshommes de 1730 des pensées d’avant-hier.

Dimanche 8 janvier. — Aujourd’hui, mon jardinier, se promenant avec moi dans mon jardin, a tiré une serpette, a entaillé le déodora, et m’a dit : « Il est gelé, il est mort ! » et ainsi des lauriers, des alaternes, des fusains, et à peu près de tout, avec le refrain : « C’est gelé ! c’est mort !… Voyez, le bois doit être blanc ». Et il me faisait voir une petite teinte brune, la teinte d’un bois qui devient du bois à fagot.

Vraiment, quoique ça paraisse imbécile de dire, c’est fait pour moi, pour moi seul, elle est vraiment singulière la malechance que je rencontre en tout et partout. Moi, resté si longtemps indifférent à la nature, si peu soucieux de ses beautés, il arrive qu’une