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tirait timidement de sa poche une enveloppe, où étaient deux billets de cent francs. Diaz ouvrait l’enveloppe, dépliait les deux billets, puis, lui tirant l’oreille, lui disait : « Jeune homme, c’est trop ! » — et il lui rendait un billet.

Mercredi 1er février. — Un Anglais chez Renan :

« M. Renan ?

— C’est moi, Monsieur.

— Alors, monsieur, vous savez si la Bible a dit que le lièvre était un ruminant ?

— Ma foi, non, monsieur, mais nous allons voir. »

Renan prend une Bible hébraïque, cherche parmi les préceptes de Moïse, et trouve cette phrase : « Tu ne mangeras… tu ne mangeras pas le lièvre, parce qu’il rumine. »

« C’est parfaitement exact… la Bible dit que c’est un ruminant.

— Moâ, bien content — reprend l’Anglais qui parle très mal le français — je ne suis pas un astronome, je ne suis pas un géologue… les choses que je ne sais pas, ne me regardent pas… je suis un naturaliste… Donc, puisque la Bible dit que c’est un ruminant, et que c’est une erreur… la Bible n’est pas un livre révélé… Moâ bien content… »

Et il repasse la porte là-dessus, débarrassé tout à coup de sa religiosité. C’est bien anglais.