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ménage Daudet. À la fin du dîner, Daudet reproche à sa femme gentiment et d’une manière philosophique, de ne pas connaître la pitié pour les malheureux. Elle répond très franchement que cela n’est plus, mais que cela était autrefois, quand elle était toute jeune, toute bien portante, toute vivante, dans le bonheur d’une existence facile et aisée, et qu’alors il n’y avait dans la charité qu’elle faisait, aucun attendrissement, rien de son cœur. C’est une confession très curieuse et très vraie de la jeune fille, parfaitement heureuse.

La compassion ne vient que par la connaissance et le contact des misères humaines.

Mardi, 20 mars. — Aujourd’hui, je ne puis tenir chez moi, je ne puis travailler, je ne puis attendre le soir, où j’ai l’espoir de voir, chez Charpentier, la physionomie de mon volume. J’entre chez les marchands de gravures, et dans la nuit en plein jour d’un orage terrible, je feuillette des estampes, en m’appliquant, sans réussir, à les trouver très amusantes.

Mercredi, 21 mars. — Aujourd’hui paraît La fille Élisa. Je suis chez Charpentier à faire mes envois, au milieu de commis qui passent, à tout moment,