Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en pleine civilisation, par le peuple qui se prétend le civilisé par excellence, cette formule me revient souvent à l’esprit.

Je me demande, comment toutes les plumes, tous les talents, toutes les indignations ne sont pas soulevées contre cet axiome blasphématoire, comment toutes les idées de justice, semées dans le monde par les philosophies anciennes, le christianisme, la vieillesse du monde, n’ont pas protesté contre cette souveraine proclamation de l’injustice, comment il n’y a pas eu insurrection contre cette intrusion du darwinisme en la réglementation contemporaine, et peut-être future de l’humanité, comment enfin, toutes les langues de l’Europe ne se sont pas associées, dans un manifeste de la conscience humaine, contre ce nouveau code barbare des nations.

Mardi 23 juillet. — Un ministre de Thiers qualifie ainsi la politique de son chef : « C’est un usufruitier qui ne fait pas les grosses réparations. »

La conversation tombe sur Jules Simon, — c’est Ernest Picard qui parle, et on sent dans les sous-entendus, dans les réticences diplomatiques de l’ambassadeur, toute sa méprisante antipathie pour le ministre de l’Instruction publique. Picard nous le montre, pendant toute la Défense nationale, assis sur une chaise, en arrière de la table du conseil, en un coin, dissimulé, et retraité dans l’ombre, ne se déci-