Page:Goncourt - Journal, t6, 1892.djvu/65

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paroles, de la tête. La première fois que je m’en suis aperçu, cela m’a profondément attristé…, cette attention m’a averti que je commençais à être un vieux. »

Mardi 3 décembre. — Aujourd’hui, au dîner des Spartiates, Francis Magnard racontait la petite cause, qui a amené la chute de la colonne Vendôme.

Une fille, dont Magnard ne se rappelle pas bien exactement le nom, jouissant d’une certaine notoriété, avait été abandonnée par un riche entreteneur, à cause de ses relations avec un ingénieur. Pendant la Commune, se trouvant fort désargentée, elle reprochait à son amant d’être la cause de sa misère, et celui-ci chercha, s’ingénia à trouver un moyen de gagner de l’argent. Il eut l’idée d’appliquer le système du sifflet, la coupe en biseau de la colonne, système, sans lequel il eût été presque impossible de la jeter à bas ; et il eut, pour son invention, une somme de 6 000 francs, qu’il donna à sa maîtresse.

Mercredi 4 décembre. — « Le peuple est une bête qui vit de gloire, — disait brillamment, ce soir, Renan chez la princesse — mais quand il s’est accoutumé à ce foin, il faut lui en donner tous les jours, c’est ce qu’avait fait Napoléon, c’est ce que n’a pas fait Bismarck… C’est peut-être très grave pour lui. »