Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/14

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quelle je voulais dire son fait à la critique, cette préface jetée sur le papier dans un premier moment de surexcitation, je ne la publierai pas, parce que je ne me sens plus capable de la parfaire, telle que je l’avais conçue dans la fièvre de l’ébauche, et je dirai même, que je ne me sens plus la vaillance d’en subir les conséquences.

 

Mademoiselle *** avait commencé par me parler de la pièce, et m’avait dit qu’au moment, où Dumény carotte à Réjane les quarante francs de la sage-femme, elle avait entendu derrière elle, une voix qui jetait à un voisin, injuriant la pièce et l’auteur : « Je vous défends d’insulter un homme de ce talent ! » et que s’étant retournée, elle avait aperçu un jeune homme d’une ressemblance parfaite avec moi, un de Goncourt de 25 ans. Je ne crois pas cependant avoir de petits Goncourt de par le monde.

Samedi 5 janvier. — À regarder l’eau-forte d’un crépuscule (Sunset in Tipperary) de Seymour Haden, cette eau-forte, où existe peut-être le plus beau noir velouté, que depuis le commencement du monde, ait obtenu une pointe d’aqua-fortiste, à la regarder, dis-je, ce noir fait, au fond de moi, un bonheur intérieur, une petite ivresse, semblable à celle que ferait naître chez un mélomane, un morceau de piano d’un grand musicien, joué par le plus fort exécutant de la terre.