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Italie, ainsi que je lui avais conseillé, comme le terrain d’un thème à phrases mystico-picturales, m’interroge sur le sujet qu’il pourrait bien traiter. Je lui conseille alors de rester à Paris, d’étudier ses quartiers, et de faire, sans l’humanité qui l’habite, une description psychique des murs.

Daudet se plaint d’avoir, pour le moment, en littérature deux idées sur toutes choses, et c’est le duel de ces deux idées dans sa tête, qui lui fait le travail difficile, hésitant, perplexe. Il nomme cela « sa diplopie ».

Ce soir, il me lit un acte de sa pièce (La lutte pour la vie). C’est une pièce d’une haute conception, découpée très habilement dans des compartiments de la vie moderne. Il y a une scène se passant dans un cabinet de toilette, qui est un transport au théâtre de la vie intime, comme je n’en vois pas faire par aucun des gens de théâtre de l’heure présente.

Mardi 5 février. — Un rêve biscornu et cauchemaresque. J’étais condamné à mort pour un crime, commis dans une pièce que j’avais faite, un crime dont je n’avais pas la notion exacte dans mon rêve, et c’était Porel qui était le directeur de la prison, le Porel aux yeux durs du directeur de théâtre emmoutardé, — et qui m’annonçait que j’allais être guillotiné le lendemain, me laissant seulement le choix de l’être à sept heures au lieu de cinq heures du ma-