Page:Goncourt - Journal, t8, 1895.djvu/43

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parlait… il parlait comme jamais je n’ai entendu parler un homme ! » Ah ! le bel article à faire sur la lourde bêtise et l’ignorance des jeunes blagueurs de première. Et chez ces gens pas deux sous d’intelligence : ce qu’il y avait à blaguer dans cet acte, à blaguer avec intelligence, c’était la résurrection de Perrin, et ils ne l’ont pas fait…

Enfin arrive le cinquième acte, qu’on joue au milieu de l’égayement, amené par la figure de Pierrot, que s’est faite un détenu. Mais le dramatique de l’acte prend à la fin des gens. Et le baisser du rideau, après l’annonce du nom des deux auteurs, a lieu dans les applaudissements.

Zola, un moment, vient chaleureusement me féliciter d’avoir la salle que j’ai, me congratuler de n’être pas reconnu, d’être contesté, d’être échigné ; cela prouve que je suis jeune, que je suis encore un lutteur, que… que… que…

— Ah ! que vous êtes détesté, haï, — c’est Rosny qui succède à Zola, — cela dépasse l’imagination, il fallait entendre ce qu’il y avait de fureur contre vous dans les corridors, et ce n’est point encore tant le lettré que l’homme, qui est abominé !

— Oui, oui, je le sais, mon éloignement du bas monde des lettres, mes attaques contre la société juive, aujourd’hui régnante, mon dédain, mes mépris pour le ramassis interlope d’hommes et de femmes dont se compose une première, l’honorabilité même de ma vie… Tout cela fait qu’on me déteste, vous ne m’apprenez rien !