Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/183

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met à proclamer que Wagner est un génie supérieur à Beethoven, et se montant, se montant, arrive à affirmer, que c’est un génie aussi grand qu’Eschyle, que son Parsifal égale le Prométhée.

Là-dessus, son père lui dit que, dans le langage non articulé, qui est la musique, Wagner lui a donné des sensations, comme aucun musicien, mais que dans le langage articulé, qui est la littérature, il connaît des gens qui sont infiniment au-dessus de lui, notamment, le nommé Shakespeare.

Alors Rodenbach qui est là, prend la parole — et ce soir, il parle merveilleusement — déclarant que les vrais grands, sont ceux qui s’affranchissent des modes, des enthousiasmes, des engouements épileptiques d’un temps, établissant que la supériorité de Beethoven est de parler à la cérébralité, tandis que Wagner ne s’adresse qu’aux nerfs, déclarant, qu’on sort de l’audition de Beethoven, avec un sentiment de sérénité, tandis qu’on sort de l’audition de Wagner, endolori, comme si on avait été roulé par les vagues, un jour de grosse mer.

Dimanche 12 novembre. — Réouverture du Grenier.

Dans un coin, le vieux Rosny parle de Napoléon, et de temps en temps, à une phrase brillante prononcée par lui, se retourne pour voir, si elle a été entendue de la chambrée. Léon Daudet, dans un autre coin,