Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/215

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richesse d’images, de l’horreur, de l’horreur… mais de l’horreur amusante, et un style brisé, plein de vie, au milieu d’une ironie féroce, d’une ironie à la Swift.

Lundi 2 avril. — Exposition des pastellistes. — Helleu : des pastels où l’on sent un œil de peintre, amoureux de douces étoffes, de tendres nuances passées, de soieries harmonieusement déteintes. — Duez : des fleurs au beau et large dessin, dans leur mollesse et leur rocaille fripée. — Lhermitte : de vieilles rues normandes, au puissant écrasis de pastel, balafrées en leur ombre bleuâtre, de coups de soleil dorés.

La soupe servie chez Mme Sichel, le docteur Martin tombe dîner. Le délicat repas l’amène à parler du temps, où, avant d’être médecin, il était directeur d’une exploitation de soufre, aux environs de Naples, dans une localité, où il se nourrissait absolument de soupe aux choux et de salade de pommes de terre. Il arrivait cependant des jours, où il lui venait l’idée de faire un dîner, comme dans un restaurant de Paris. Or, il se trouvait, que la contrée était pleine de bécasses, et qu’on lui vendait, en le volant beaucoup, 50 centimes. Et achetant toutes celles qu’on lui apportait, il finissait par en avoir une quarantaine, qu’il surveillait, et qu’il mettait à la broche, lorsqu’une plume se détachait du cou. Et ma foi, il