Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/290

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délicatement ajouré, et au milieu duquel éclate une tulipe violette.

Puis encore au-dessus, des médaillons de Nini, ces gracieuses et coquettes demi rondes bosses des grandes dames du XVIIIe siècle, dans le relief amusant des fanfreluches de leurs toilettes, et où se trouve le médaillon de Suzanne Jarente de la Reynière (1769), qui est son chef-d’œuvre, par la fine découpure du profil, le tortillage envolé des boucles de cheveux, la ciselure du tuyautage d’une guimpe, cachant l’entre-deux des seins de la femme décolletée. Et au milieu des Nini, une tête de femme, au nez retroussé, au ruban courant dans la frisure des cheveux, et se détachant en blanc sur le fond bleu, papier de sucre des Wedgwood, passe pour un portrait de Mme Roland, et encore, grand comme une pièce de cent sous, en biscuit pâte tendre de Sèvres, un médaillon de Marie-Antoinette, dont la finesse du modelage peut lutter avec le travail des camées antiques.

Entre ces médaillons est suspendu le bistre original de Fragonard, dont la plaisante composition a été vulgarisée par l’aquatinte de Charpentier, sous le titre : La Culbute. Un jeune paysan, dans sa précipitation à embrasser son amoureuse, culbute le chevalet du peintre, devant lequel elle est en train de poser.

Le bistre de Fragonard est dominé par une sensuelle académie de femme couchée, vue de dos, une jambe allongée, l’autre retirée sous elle. Ce Boucher