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À onze heures, Sarah Bernhardt accoudée sur le marbre de la cheminée du grand salon, lit nonchalamment, avec sa voix d’or, à travers un face-à-main, l’Hommage à Edmond de Goncourt de Robert de Montesquiou :

Les paons blancs réveillés par la Faustin qui rêve,
Glissent en notre esprit avec moins de douceurs
Que la grâce de vos héroïnes sans trêve,

Maître : Marthe, Renée, et Manette et leurs sœurs,
 
Les paons blancs évoqués par la Faustin qui songe.
 

Et pendant que Sarah récite ces vers, il m’est donné de les suivre, dans un exemplaire calligraphié par Montesquiou, et enluminé par Caruchet, où sur le chamois du papier, de délicates plumes blanches de paons, peintes d’une discrète manière à la gouache, semblent les élégants filigranes du papier.

Je vais remercier Sarah, dans sa toilette d’idole, et sa séduction indéfinissable de magicienne antique.

Là-dessus Montesquiou me présente aux belles dames du noble faubourg et d’ailleurs, qu’il traîne à sa suite, à la duchesse de Rohan, à la comtesse Potocka.

Et la soirée se termine par la Soularde d’Yvette Guilbert, la Soularde, où la diseuse de chansonnettes, se révèle comme une grande, une très grande actrice tragique, vous mettant au cœur une constriction angoisseuse.