Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/391

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plus à mon frère qu’à moi, par l’esprit mis dans le livre par lui, et ces brillants morceaux de bravoure, qu’il recommencera plus tard dans Manette Salomon — moi, ayant surtout travaillé dans ce livre, à l’architecture et aux gros ouvrages de l’œuvre.

Alors succédaient les biographies d’art et les livres historiques, écrits un peu sous ma pression, et la tendance naturelle de mon esprit vers la vérité du passé ou du présent : œuvres, où il y avait peut-être un peu plus d’appoint de moi, que de mon frère. Dans cette suite de travaux, se faisait la fusion, l’amalgame de nos deux styles, qui s’unissaient dans la facture d’un seul style, bien personnel, bien Goncourt…

Dans cette concurrence fraternelle à bien écrire, il était arrivé que mon frère et moi, avions cherché à nous débarrasser de ce que nous devions à nos aînés : mon frère à rejeter le papillotage du style de Janin, moi la matérialité du style de Gautier. Et nous étions à la recherche, tout en le voulant très moderne, à la recherche d’un style mâle, concret, concis, à la carcasse latine, se rapprochant de la langue de Tacite, que nous lisions alors beaucoup. Et surtout, il nous venait une horreur des grosses colorations, auxquelles j’avais un peu trop sacrifié, et nous cherchions dans la peinture des choses matérielles, à les spiritualiser par des détails moraux.

Ainsi cette description du bois de Vincennes, dans : Germinie Lacerteux.

 

« D’étroits sentiers, à la terre piétinée, talée, durcie,