Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/171

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passants auxquels elle se vendait, de lui apporter dans l’acte charnel les restes de tous, de le salir enfin, comme disait cette autre, de la publicité de son contact.

Elle eût voulu l’aimer, être aimée de lui, rien qu’avec des lèvres qui embrasseraient toujours.

Et continuellement sa tête, dans l’élancement pur d’un rêve chaste, forgeait, entre elle et le lignard aux fleurs, des amours avec des tendresses ignorantes, avec des caresses ingénues, avec des baisers innocents et doux, baisers qu’elle se rappelait avoir reçus autrefois, toute petite fille, d’un amoureux de son âge.

Elle avait honte vraiment de dire cela à un soldat. Mais bien souvent la révolte secrète de son corps, se dérobant aux ardeurs amoureuses de son amant, se traduisait en des résistances emportées, rageuses, toutes voisines des coups, et qui paraissaient singulières à cet homme, venant de la part de cette femme, qu’il savait, qu’il sentait l’adorer.