Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/290

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du bas âge, elle ne l’eut plus. Chez elle, se refirent, dans leur débordante effusion, les petits bonheurs d’une bambine de quatre ans. Son vieux madras de tête avait-il été remplacé par un madras neuf ? on la voyait tout éjouie passer sa main à plusieurs reprises sur la cotonnade ; on surprenait sa bouche formulant en un souffle qui s’enhardissait presque dans une parole : « Beau ça ! » Quelque dame charitable de la ville, en une année d’abondance, avait-elle envoyé un panier de fruits pour le dessert des détenues ? devant les quatre ou cinq prunes posées dans l’assiette creuse, les yeux allumés de gourmandise, les lèvres humides et appétantes, elle battait des mains !

Au milieu de cette reprise d’Élisa par les toutes premières sensations de la vie, un curieux phénomène se passait dans sa pauvre mémoire. Dans cette mémoire, jour par jour, des morceaux de son existence d’autrefois s’enfonçaient dans des pans de nuit, et son