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Page:Goncourt - La Fille Élisa, Charpentier, 1877.djvu/99

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de cette perpétuelle et toujours recommençante pérégrination, Élisa, sans même demander un merci, les supportait avec la sereine et inlassable constance de l’abnégation.

Élisa cependant n’aimait vraiment pas. Rien d’une de ces passions physiques qui viennent à une femme de sa classe par des causes secrètes et inconnues pour un mâle spécial, ne remuait ses sens. Son cœur n’avait point été touché. Le commis-voyageur n’était au fond pour cette femme, à la cervelle échauffée, que le prétexte à un dévouement prêt à jaillir, depuis des mois, au profit du premier passant. Disons-le, dans ces liaisons de femmes à hommes, où la femme se fait la protectrice de l’homme, prend à charge et assume sur elle son bonheur, le manque d’amour est plus commun qu’on ne croit. La créature a cédé à un attendrissement psychique, à un de ces mouvements de charité humaine entrouvrant un cœur ; et un mobile, au-dessus des choses sensuelles, décide, la plupart du temps, de ces