Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/152

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de gravats sculptés, ses familles de bustes au regard de pierre usé, ses tumulus dévastés, volés de leur forme même, les colombariums éventrés, les sarcophages déserts, la prière croulée du : Dîs manibus. Çà et là elle se penchait vainement pour essayer d’épeler un nom, un de ces noms de Romain qui sont une mémoire du monde. Mais les inscriptions, aux lettres tombées, étaient toujours des énigmes du néant. Tout était muet, la mort et la terre ; et dans le vaste silence pieux de la solitude et de l’oubli, elle n’entendait rien que le bruit de la faux d’un faucheur qu’elle ne voyait pas, et qui lui semblait faire le bruit de la faux invisible du Temps.

Elle retournait, elle revenait le long du pâle cimetière qui la reconduisait de chaque côté, par la campagne douteuse où se dressaient des fantômes d’oliviers. Et bientôt, entre deux murs de ténèbres, la découpure arrêtée et rigide des maisons, des bâtisses, des toits, des pins d’Italie, à travers le mystère du sourd et puissant neutre alteinte montant de la terre du pays dans