Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/199

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cause avec les anges : un rêve à voix haute où la Parisienne jetait de temps en temps une ironie polie. La comtesse n’entendait pas, continuait, ou se taisait avec l’air de prolonger et de poursuivre intérieurement sa pensée.

Aux beaux jours bleus, les deux femmes partaient, l’enfant entre elles deux, dans une voiture qui leur faisait faire invariablement cette promenade à Gensano et au lac Nemi, où elles goûtaient la vue de ce précipice de verdure, déployé sous le pont de l’Ariccia, et les brusques passages des ombres étouffées des cavées aux larges respirations sur la plaine infinie.

C’était une fête pour Pierre-Charles, gai du bonheur physique de sa santé revenue et de la joie du temps dans le paysage. En route, attirant à lui sa mère, lui prenant le menton avec le bout de ses doigts, il approchait et penchait sa figure sur la sienne, pour faire tomber son baiser sur le sien ; puis il se mettait à chantonner à demi-voix une musique qu’il inventait pour se parler, pour se chanter à lui-même, monologue